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13/09/2010

[Chronique] Slum Village - Villa Manifesto (2010)


Genre: Hip Hop from the D
Label: E1 Records
Date de sortie: 27 Juillet 2010
Productions: Young RJ, J Dilla, Mr. Porter, T3, Madlib, Hi-Tek, Supa Dave West, Khrysis.
Featurings: J Dilla, Illa J, Posdnuos, Phife, Little Brother, Dwele, AB, Colin Munroe, Keys, ?uestlove.

"Villa Manifesto" ou la chronique d'un groupe génial mais pourtant maudit jusqu'à ses dernières heures d’existence. On ne rappellera pas l'histoire de Slum Village dans sa globalité, parcours fait de départ, de retours et de nouveaux membres, mais situons tout de même l'ambiance dans laquelle s'est réalisé ce dernier LP. Le groupe, constitué seulement de T3 et Elzhi depuis plusieurs années (si l'ont fait abstraction de Black Milk, finalement très présent à la production sur les précédents albums), a vu le retour tant attendu puis le décès brutal du mythique Baatin, membre essentiel à l'âme du groupe, comme le fût J Dilla (présent lui aussi de façon posthume). Ce "Villa Manifesto" aurait du donc être un rassemblement ultime, un chant glorieux mais résonne, malgré ses qualités, comme un requiem bancal et maladroit.

Maladroit, car des querelles troubles entre T3 et Elzhi quelques semaines avant la sortie de l'album sont venues gâcher le propos et le contenu, faisant disparaître plusieurs couplets du petit MC à lunettes, pourtant désormais la principale attraction vivante du groupe aux yeux de nombreux fans. Bancal, car si T3 semblait vouloir réunir ceux qui ont fait l'histoire de SV, il semble avoir oublié Black Milk ou encore Phat Kat. Les regrets sont donc bien présents à la lecture du tracklisting, malgré tout, il serait bête de bouder notre plaisir de réentendre Baatin ou Dilla, ou d'apprécier le vrai retour aux affaires du beatmaker Young RJ (ex-moitié du duo B.R. Gunnaz avec Black Milk)...

D'emblée, le son est bon, et le swag typique de Detroit se fait entendre, T3 occupant une place certaine au sein du disque. On redécouvre avec plaisir le beat de Dilla sur "Lock It Down" (présent sur "The War LP" de Waajeed en 2007), cette fois-ci garni des prestations de maître des trois MC's, le track sonnant au final comme un aboutissement ultime du son Slum Village. Son que l'on entendra aussi sur plusieurs sons produit par Young RJ: "2000 Beyond", où Jay Dee donne de la voix et ?uestlove de la batterie, "Um Um" (feat. Keys) ou encore l'excellent "The Reunion Part.2" où Baatin et T3 font des merveilles mais où Illa J (semblant prendre la place d'Elzhi...) accouche d'un rap sans maîtrise et sans âme se contentant de singer les gimmicks de son défunt frère au micro. On signalera aussi d'autres productions efficaces de Young RJ, comme le deep "Where Do We Go From Here" (où sont invités l'autre groupe désormais splitté Little Brother) ou le single un peu usant "Faster", sans doute gâché par le refrain de Colin Munroe. Mention spéciale tout de même au très réussi "Scheming", sorte de jubilé Native Tongues réunissant sous la même bannière feu J Dilla (décidément bien présent), Posdnuos (De La Soul) et Phife (A Tribe Called Quest), les nostalgiques apprécieront.

Mais d'autres beatmakers viennent faire sonner leur kit batterie, à l'instar de Khrysis, peignant l'introductif et cuivré "Bare Witness" (signalons DJ Babu aux cuts). Madlib nous offre une relift un chouia bodybuildé de son "Drink Up" (feat. Frank N Dank sur son album sorti chez BBe en 2008) avec "Earl Flinn", ce qui rallonge la liste des beats non-inédits... On notera avec intérêt les présences de Supa Dave West sur le bien nommé et funky "Dance" (avec le très adéquat AB aux refrains et choeurs) ou encore de Hi-Tek sur le plutôt enthousiasmant et très idoine "The Set Up". Et des locaux de l'étape Mr. Porter accompagné de T3, forgeant l'instrumental de "Don't Fight The Feeling", terriblement Slum, laidback et synthétique au départ (avec l'indispensable Dwele au refrain) pour se muer à mi-chemin en un afro beat métissé de sonorités indiennes où Baatin vient entonner ces chants hypnotiques dont il avait le secret.

Désormais seul maître à bord, T3, garant auto-proclamé d'un héritage lourd à porter, ne s'en tire pas moins avec les honneurs. Il est le fil rouge du groupe, et s'il n'a ni la technique d'Elzhi ou le charisme de Baatin, il reste un MC affûté et talentueux, et brille ici très nettement, track après track, à l'instar d'un Scottie Pippen à la retraite de Jordan. Evidemment, les couplets de Baatin sont pur bonheur et instants de grâce tandis que ceux d'Elzhi sont talent pur et maîtrise total de son art. Evidemment, l’ouïe ne peut qu'être flattée de ré-entendre J Dilla au beat comme au micro. Il n'en reste pas moins qu'il s'agit sans nul doute là de la dernière charge de la cavalerie, se faisant non sans heurts, et qu'il faut dorénavant faire notre deuil de ce groupe légendaire et savoir tourner la page.

Mais soyons clairs, si une amertume de fin de cycle accompagne inéluctablement l'écoute de cet album, il n'en reste pas moins que ce "Villa Manifesto" est produit avec efficacité, fait montres de jolies fulgurances et saura au final contenter un certain nombre de fans irréductibles et au delà. Un disque finalement très proche de "Trinity", dans le son comme dans les circonstances, mais qui, au demeurant, ne fera pas oublier ce qu'il aurait pu et du être si le destin avait été autre. On attend dorénavant la suite des aventures, à savoir les carrières solo de T3 et d'Elzhi (avec notamment un livre sur le flow et la technique rapologique pour ce dernier)...

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